Les péripéties de la Loire
Une crue correspond à la montée des eaux d’un cours d’eau causée potentiellement par de fortes précipitations, une élévation du débit ou une fonte rapide des neiges. Les crues de la Loire ont une origine à la fois océanique et cévenole : elles peuvent être provoquées par de fortes dépressions venant de l’Atlantique ou par de puissantes précipitations orageuses d’origine méditerranéenne.
La ville de Tours a été submergée à plusieurs reprises par les crues de la Loire et n’a cessé d’adopter des mesures afin de réduire ce risque d’inondation.
Liste des plus grandes crues à Tours.
«De l’ère de l’aménagement à l’ère du ménagement» (Marié, 1985)Au Moyen-Âge
Depuis longtemps, les hommes ont dû faire face aux inondations. Jusqu’au Moyen-Âge, ils laissaient la Loire se déverser et fertiliser de vastes plaines. Ces plaines étaient exploitées pour l’agriculture, il n’y avait aucune construction. Pour ralentir les écoulements des eaux, favoriser le dépôt de limons et protéger les villages avoisinants, ils fabriquaient en bord d’eau des blocs de terre consolidés par des branches, les “turcies”
Au 12e siècle, ces levées deviennent plus hautes et plus résistantes, abritant de nouvelles constructions.
A la fin du 15e siècle jusqu’au début du 17e siècle, des ruptures de digues surviennent. C’est alors qu’une course effrénée en faveur de l’endiguement s’amorce. Des travaux sont mis en oeuvre afin de surélever les levées : leur hauteur originelle de 4 m au-dessus de l’étiage passe ainsi à 5 m en 1573, pour gagner 7 m en 1784 et enfin 8,40 m en 1922.
Au 18ème siècle, le rehaussement des levées provoque une élévation de la hauteur d’eau dans le lit endigué métamorphosant le faciès des villes
Crues du 19e siècle
Dès 1629, en plus de renforcer et d’allonger les digues, des “déchargeoirs” (plaines chargées de détourner les eaux) sont aménagés. De plus, les bondes sont bouchées et réouvertes lors de la décrue. Au début du 19e siècle, en l’absence de crues dévastatrices, ces mesures semblent porter leurs fruits. Mais les crues de 1846 et 1856 les remettent en cause.
Lors de la crue de 1846, l’eau atteint une hauteur maximale de 6,78 m dans la région Orléanaise. Afin de protéger la ville, les bondes sont définitivement bouchées et le réseau d'égouts est amélioré.
En 1856, la Loire déborde et inonde de nouveau Tours. Cette crue est qualifiée de crue historique, soit la plus haute montée des eaux jamais connue (7 m de hauteur). La Loire passe au-dessus du canal et s’engouffre dans les quartiers neufs au sud des boulevards Heurteloup et Béranger. Les levées sont de nouveau surélevées.
En 1866, le val de Loire est encore victime d’une crue. De nombreuses digues cèdent, l’eau atteint 6,92m de hauteur.
Ces trois événements survenus au cours du 19e siècle resteront gravés dans la mémoire collective.
Crues du 20e siècle
La crue de 1907 est la “dernière” crue importante. Étant donné que le nombre de crues diminue au cours du XXe siècle, les hommes se méfient moins des dangers liés aux fleuves et on note une hausse de la démographie et une urbanisation exponentielle en zones inondables.
Afin d’aménager la vallée du Cher, le lit majeur du Cher est dévié en 1969. Il faudra attendre la fin du XXème siècle pour qu’une prise de conscience commence à s’opérer. Il est cependant trop tard pour faire marche arrière et les nouveaux enjeux vont être alors de réduire la vulnérabilité des hommes et de leurs biens en cas de catastrophe naturelle.
Dorénavant, les politiques publiques insistent davantage sur la prévention du risque, avec le recours à des mesures institutionnelles et juridiques, plus que sur la protection (avec des aménagements tels que des digues, des bassins de rétention ...) comme ce fut le cas par le passé.
On assiste également à un changement de comportement vis-à-vis de la gestion du risque d’inondation, passant d’une approche “techniciste” à une approche plus “résiliente” ou du moins allant vers une logique préventive.
Pour continuer : La réglementation et ses évolutions
Pour aller plus loin :
“ Le risque est une notion subjective, et son appréciation largement déterminée par un mode de représentation propre à chacun” (Martinais, 1996)
“Les expériences vécues, la mémoire des inondations, les relations quotidiennes avec le danger, la position technique ou scientifique, la position institutionnelle, l’appartenance à tel ou tel groupe social ou professionnel, sont autant de paramètres qui peuvent modifier la représentation du risque.” (Sylvain Rode. Au risque du fleuve. La territorialisation de la politique de prévention du risque d’inondation en Loire moyenne. Géographie Université de Nanterre - Paris X, 2009)
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Pour aller plus loin : Conscience du risque inondation à La Riche : une faible conscience du risque qui apparaît logique.
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